L'Autre Côté

-CLAC-
Je refermais sèchement le livre que je venais de finir. Je soupirais. Encore la même histoire d’extraterrestre qui tue, envahi, contrôle, kidnappe, détruit l’humanité. Le héros trouve la fille, sauve le monde et sort avec la nana qui l’a aidé.
Bref, toutes les histoires commencent à se ressembler. Surtout que, jusque là, je n’ai lu que de la science fiction.
Reposant le livre, j’observai les rayons de la bibliothèque. Cette dernière était vide à cette heure-ci. Reculant de quelques pas, j’aperçus l’horloge au dessus de l’accueil. La bibliothèque était d’un style ancien mais avec ce côté un peu royal patiné par le temps. C’est ce qui lui fait son charme je pense.

J’ai oublié de me présenter, je sui Eric, Eric Saber.
Certaines filles me disent que j’ai le visage d’un dieu grec avec mon teint ni trop pâle, ni trop bronzé avec mes yeux verts où flottent une multitude d’étoiles d’or et ma chevelure blonde comme un soleil d’été.
C’est ce que disent les autres. Moi je ne suis que moi. Même si je me sais beau. Enfin, je le suis jusqu’à ce que les filles apprennent que je suis un mordu de lecture. Les filles, comme les garçons, aiment de moins en moins lire. Pourtant, j’adore ça.

Je me mis à arpenter les rayons remplis d’aventure, de larmes, de guerre et de tendresse.
Je vous avoue que l’idée d’aller chercher un nouveau style de lecture ne me plaisais pas vraiment malgré le fait que je sentais que je devais changer. Compliqué tout ça.
Je parcourais du regard les livres neufs de la section Fantastique. Je lisais les titres sans vraiment les lires et j’avançais sans m’arrêter. Jusqu’à ce que je l’aperçoive, ce livre, usé par le temps et à la couverture de cuir incrusté en lettres dorés. Il faisait tâche entre tout ces livres neufs et à la mode. Que faisait-il ici ? Il ne serait pas mieux dans les archives ?
Je me doutais que quelqu’un ne veuille encore le lire. Je fus tout de même piqué par la curiosité.
Dès que ma main toucha la reliure, j’eu un pressentiment étrange. Je m’imaginais de l’électricité ou plutôt, une énergie passer du livre à moi et de moi au livre. J’avais une grande imagination certes, mais cette impression sembla réelle.
Je m’assis sur le fauteuil rouge sur lequel je lisais toujours mes romans de science fiction. Enfin, maintenant je dois dire : le fauteuil rouge où j’aime bien lire mes romans.
J’ouvris le livre. Etrange. Puis Effrayant. Au fil des pages, la passion grandissait. Cette passion se transformait aussi au fil des chapitres, elle se transformait en frayeur. Ce n’était pas un roman comme les autres. Je ne parle pas de son état, mais du contenu.
Ce n’était pas l’histoire d’un personnage qui vivait ses aventures mais plutôt une suite de diverses recherches scientifiques, de rapports, de notes, de témoignages. Comme une sorte de journal de bord.

Il énonçait souvent l’ « Energie ». Cette Energie serait source de toutes choses. Que ce soit vivant ou non. On peut facilement penser qu’il désigne les molécules qui forment tout ce qui nous entoure. C’est ce que je pensais en premier lieu. « Mais qu’est ce qui a crée les molécules ? » La réponse fut : L’Energie. Les auteurs, ou l’auteur… je ne sais plus… il a dit que L’Energie c’est la vie, l’infini.
D’autres scientifiques du livre ont pensés que l’Energie était une sorte de magie, la magie de la vie, le secret des magnétiseurs et de tout ce qui est inexpliqué.
D’après le témoignage d’un certain Albert Al’Baktar, ancien étudiant très qualifié, l’Energie peux être contrôlée, certains êtres humains y arriveraient, sans s’en rendre compte.
C’est son ami qui a continué l’écriture. Il expliquait en large, en long et en travers l’Energie, son fonctionnement et les expériences qu’il faisait. Tout semblait si concret.
C’est alors que je revis l’écriture d’Albert. C’était un an plus tard. Apparemment, son ami qu’il avait perdu de vue, avait utilisé l’Energie pour créer un nouveau monde : L’Autre Côté. Ce monde était si bien décris, si bien expliqué qu’un instant, j’ai cru y être.

Je sursautais quand une main tapota mon épaule.
-C’est l’heure Eric. Si tu veux, tu peux emprunter un livre, me dit la bibliothécaire souriante.
J’allais dire mon éternel « non ». Mais il y a quelques heures, j’avais changé. Ce n’était plus des extraterrestres, ce n’était plus la fin du monde. L’Autre Côté...
J’observais ce qui m’entourait. Le choc de la réalité. J’étais entré dans un rêve étrange, un peu effrayant tout de même.
-Je vous emprunterais celui-ci madame Delony.
-Très bien mon petit Eric.

La fraîcheur de la nuit me mordit le visage. Je frissonnais.
Je n’ai jamais cru en d’autres mondes, mais ce livre, il semblait vouloir démontrer le contraire.
Pourquoi le tenais-je si fermement ? Représentait-il la vie ? Non. Bien sûr que non. J’observais la couverture en cuir usé serré par mes doigts gelés. Pourtant, j’avais toujours cette impression d’électricité, de vie mais aussi de blessure et de maux qui grésillait sous mes doigts.
Je soupirais. Un nuage de désespoir s’enfui de ma bouche et s’envola comme un spectre s’envolerais vers la lumière lunaire. Je l’observais s’élever dans la nuit étoilée. Il fallait que je revienne à la réalité.
La nuit m’ouvris ses ailes. Je marchais le long de la rivière, le livre dans mon sac cette fois.
-CRAC-
Je quittais le chemin des yeux et chercha autour de moi la source de ce bruit. Le banc était vide, la route déserte. Rien.
-Qui est là ? Murmurais-je peu sûr de moi.
Dans les films, j’avais pitié de ces gens là, demandant au ravisseur, humain ou non, s’il était là. Quelle absurdité ! Mais la frayeur me prit.
Je ne savais pas si c’était le vent glacial, mon imagination ou la peur, mais il me semblait que dans mon sac à dos, une chaleur étrange s’échappait du livre.
C’est alors que je la vi, cette ombre éphémère, comme un papillon. Rapide, silencieuse et belle. Je ne vis qu’une chevelure brune et une cape noire. A moins que ce n’était qu’un voile, car je n’ai pu voir le visage de l’ombre fantomatique.
Elle avait disparut, comme si elle n’avait jamais existé. J’entendis un grognement sur le côté, et sans crier gare, je me mis à courir. Ce n’est qu’un chien, pensais-je, mais je continuais à courir en jetant des regards derrière moi, là ou se tenaient deux yeux jaunes il y a quelques instants.
Enfermé dans ma chambre, j’observais la nuit. Tout était comme d’habitude, à l’exception que tout me semblais à la fois différent et étrangement effrayant.
Je m’assis sur le lit, tenant sur mes genoux le mystérieux ouvrage. Sur le coup, il me semblait maléfique. Me tapotant les joues je me repris : ce n’est qu’un livre, une histoire.

La suite était faite de divers témoignages et descriptions.
« Nous étions en train de muter. » Je bloquais sur cette phrase. Apparemment, l’Autre Côté, crée par l’Energie, formerais une sorte d’Energie propre pour survivre et permettre aux nouveaux spécimens humains de vivre. Ils mutaient. Un cadeau empoisonné offert par le créateur de ce nouveau monde.
Certains avaient des sens plus aiguisés, d’autres se métamorphosaient en animaux, plusieurs devenaient plus puissant, quelques-uns se transformaient en chimère. Des choses pour la plupart ni humaines ni animales. Beaucoup eurent des gènes étranges implantés. Au début, ce n’était que de la prise de pouvoir. Les humains étaient heureux. Mais plus le temps passait, plus ils devenaient des monstres.
Beaucoup furent ceux qui perdirent toute humanité et qui attaquaient les autres humains, leurs amis. Ils disaient que l’Autre Côté les appelait.
Ce monde était devenu incontrôlable. Les Terriens créèrent donc une armée spéciale. Une équipe d’humain nommée…
-BANG-

Un caillou venait de heurter ma fenêtre. Doucement, je posais le livre sur mon lit. J’avançais vers la vitre et regarda à l’extérieur.
Je ne la vis pas immédiatement, seulement quand je vis ce chien géant à ses côtés. Une ombre éphémère qui me fixait de ses yeux dorés, encadrés de sa chevelure brune. Elle me fit signe.
J’oubliais toute peur. Quelque chose m’appelais dans ses yeux.

Cette équipe chargée de protéger la Terre s’appelait : Les Spécialistes.